Difficile de résumer en quelques mots la vie et l'œuvre d'Yves Thuriès, lui qui fut l'un de ceux qui ont érigé les fondements d'une nouvelle pâtisserie. À la fois cuisinier, pâtissier, chocolatier, il est aussi éditeur, chercheur, inventeur, créateur… Sans oublier Compagnon, membre de l'Académie culinaire de France, consacré deux fois Meilleur Ouvrier de France… Toute sa vie, Yves Thuriès a mis son nom au service de la gastronomie française. Un nom, à lui tout seul, devenu une référence et qui a marqué, influencé, voire orienté plusieurs générations d'hommes et de femmes.
Yves Thuriès naît, en 1938, dans la boulangerie familiale de Lempaut, petit village du Tarn, où officie son père. Très jeune, il montre son attrait pour les métiers de bouche et commence son apprentissage en pâtisserie à 14 ans chez Benoît Barné à Castres, puis à La Mascotte à Toulouse.
Âgé de 17 ans et son CAP en poche, il devient compagnon pour apprendre encore et toujours. Pendant près de quinze ans, il se lance sur les routes du Tour de France à la recherche de l'excellence.
“ Le Tour de France du Compagnonnage a été pour moi la preuve que l’harmonie parfaite entre l’homme et le produit, entre l’humain et la matière première était possible. Quel que soit le corps de métier, l’objectif et l’essence même de la perfection sont de savoir transformer pour bonifier. ”
En 1968, monsieur Jantou, pâtissier à Toulouse, sera son dernier employeur. Il possède une pâtisserie à Gaillac et décide de la vendre à son ouvrier, lui permettant ainsi de s'installer définitivement. Ce petit fonds de commerce, situé rue Portal, « tourne » au départ avec un seul apprenti. Dix années plus tard, une dizaine de compagnons travaillent pour lui.
Pour Yves Thuriès, c'est l'époque des concours et des prix régionaux et nationaux ; c'est aussi le début de la rédaction de son encyclopédie Le livre de recettes d'un Compagnon du Tour de France.
1976 est une année dont Yves Thuriès se souviendra toute sa vie. À 38 ans, il est consacré Meilleur Ouvrier de France dans deux catégories : « pâtissier, confiserie, traiteur » et « glaces, sorbets, entremets glacés ». Une performance unique et inégalée dans l'histoire du concours.
Innovateur, passionné et désireux de partager le résultat de ses années de recherches, il publie en 1977 « La pâtisserie française », le premier tome de son œuvre majeure Le livre de recettes d’un Compagnon du Tour de France, première encyclopédie culinaire moderne. S'ensuivent un deuxième volume sur « Les chocolats et la confiserie », puis un troisième sur « La nouvelle pâtisserie ». Actuellement, 12 tomes sont nés de la plume d'Yves Thuriès, traduits en 15 langues. Une référence pour plus de 500 000 professionnels.
“ Dans nos métiers de bouche, comme dans bien d'autres métiers, la transmission du savoir de génération en génération est l'élément essenciel de la pérennisation de notre savoir-faire et de la découverte de nouvelles techniques. ”
Avec l'essor de la nouvelle pâtisserie dans les années 80, l'établissement de Gaillac devient vite trop petit. Yves Thuriès choisit de s'installer à quelques kilomètres de là, dans le village médiéval de Cordes sur Ciel. Il acquiert Le Grand Écuyer, ancienne résidence de chasse des comtes de Toulouse, qui deviendra l'établissement le plus côté de la région et étoilé pendant 25 ans, puis l'Hostellerie du Vieux-Cordes, son bistrot. De nombreuses célébrités et les chefs d'État font halte dans la cité cordaise pour goûter à la cuisine de ce double Meilleur Ouvrier de France : la Reine-mère Elizabeth d'Angleterre en 1989, le président de la République française François Mitterrand en 1992, l'Empereur du Japon Akihito et son épouse l'impératrice Michiko en 1994, et bien d'autres....
Il crée un laboratoire de pâtisserie Pasticor, et le Musée de l'Art du Sucre, un espace ludique unique au monde, où sont regroupées des centaines de pièces artistiques en sucre et en chocolat. Très attaché à la transmission du savoir, Yves Thuriès a formé nombre de professionnels de renom, devenus à leur tour Meilleur Ouvrier de France, tels Emmanuel Renaut, Jean-François Arnoult…
En 1988, il lance son magazine, Thuriès Gastronomie Magazine, afin de promouvoir les hommes, les produits et les techniques qui font la gastronomie française.
Si la cuisine et les desserts d'Yves Thuriès attirent gourmands et gourmets du monde entier, c'est le chocolat qui achève de l'asseoir au panthéon de la gourmandise. En 1991, il lance sa propre ligne de chocolats artisanaux et innove encore une fois en créant les tablettes marbrées et son chocolat macaron. Son esprit inventif lui vaut le titre de « Leader de l'innovation ». De ses idées cacaotées naîtront un nouvel ouvrage : Caractère Chocolat, un récital de recettes, de techniques et d'amour chocolaté.
Engagé dans la formation, Yves Thuriès s'associe en 2007 avec Alain Ducasse pour reprendre l'École Nationale Supérieure de Pâtisserie à Yssingeaux, afin d'offrir une formation complète et poussée à tous les amoureux de la pâtisserie.
En 2008, il se voit décerner le « Grand prix du Livre » des Meilleurs Ouvriers de France pour l'ensemble de son œuvre.
Yves Thuriès a dédié sa vie à la promotion de la gastronomie et de l'art culinaire. Transmettre à sa profession, et donner aux jeunes ce qu'il avait eu la chance de recevoir durant son « Tour de France », et durant sa vie professionnelle, la fierté du bel ouvrage, l’amour de son métier et le bonheur de le transmettre auront été pour lui ses plus grands plaisirs et sa meilleure récompense.
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