Le billet d'humeur d'Yves Thuriès - juin 2016, Thuriès Gastronomie Magazine n°280
C’est en 2001 qu’a été rendue obligatoire l’annonce de la rémunération des grands patrons, ce qui les a amenés à se comparer et donc à s’octroyer des augmentations, sous le glorieux prétexte que « plus on gagne, c’est que meilleur on est ».
Cette année encore, la découverte de ces gros salaires n’a pas manqué de surprendre, et le doublement du salaire de Carlos Tavares le PDG de PSA dont l’État est actionnaire à près de 14 %, a suscité de grosses réactions de la part des syndicats ouvriers et du gouvernement.
Cette rémunération serait due à l’attribution d’actions de performances, le groupe aurait redressé ses comptes avec deux ans d’avance. De plus, selon PSA, la rémunération versée à son dirigeant est en phase avec celle des autres présidents du CAC 40.
Sortons du lot en 2015 la rémunération de 9,4 millions de Bernard Arnault (LVMH) ; lui, il joue de ses « propres billes », mais…
Citons alors Jean-Paul Agon (L’Oréal) avec 9,1 millions, Carlos Ghosn (Renault) 7,3 millions, Jean-Pascal Tricoire (Schneider) 5,7 millions, Carlos Tavares (PSA) 5,2 millions, Emmanuel Faber (Danone) 4,9 millions, Patrick Pouyanné (Total) 4,7 millions, Benoît
Potier (Air Liquide) 4,6 millions, Hubert Sagnières (Essilor) 4,1 millions, pour ne citer ici que les quelques meilleurs.
Bénéficiant souvent d’aides publiques énormes, sans mouiller leur argent, ces dirigeants gagnent en seulement un mois ce que bon nombre de salariés ne gagneront pas durant toute une vie de travail. L’écart est vertigineux et ubuesque.
Oui, il y a patrons et patrons ! On sait qu’en France les dirigeants des petites entreprises de moins de 20 salariés, ce qui est le cas de la plupart de nos restaurants, ceux qui journellement mettent en jeu leur argent personnel, gagnent en moyenne 40 000
euros par an, même si à l’intérieur de cette fourchette il existe de gros écarts.
On sait aussi que certains « entrepreneurs besogneux » ne peuvent même pas se prendre un salaire.
Face à ces « grands patrons » qui touchent une rémunération moyenne de 2,2 millions en 2015, un dernier sondage BVA pour l’Express, déclarait que 59 % des Français jugent que les « grands patrons » sont trop payés.
Certes, à compétences exceptionnelles, salaire exceptionnel.
Un grand patron doit être rémunéré à la hauteur de ses performances, mais d’ici à se fixer (lui-même) de telles prestations ! C’est oublier que la réussite de l’entreprise qu’il dirige est liée à un effort collectif, celui de ses collaborateurs et souvent aussi celui, il
convient de le préciser, des contribuables.
Alors, il devrait s’inspirer d’un esprit de modération.
Et puis, la valeur, le talent d’un individu peuvent-ils tout justifier ?
Quelques milliers d’euros en moins par an ne changeraient pas la vie des grands patrons (ni celle des grands sportifs), et, en période de crise, ce serait un geste exemplaire. Un symbole aussi.
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